10 pièges à éviter en cas de levée de fonds

Nov 14, 2023 | Protips

10 pièges à éviter en cas de levée de fonds

 

La levée de fonds est une opération financière consistant à intégrer des investisseurs dans le capital social d’une société. Les investisseurs apportent des fonds à la société et reçoivent des titres en contrepartie. Cette opération constitue une phase cruciale pour toute société, et ce, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’une start-up. Virginie Florance, avocate associée chez Mermoz Avocats en private equity et M&A, pointe les pièges à éviter tout au long d’une levée de fonds pour réussir cette étape ô combien importante. En voici dix.

En amont, lors de la phase d’amorçage

 

    1. #1 Ne pas encadrer les relations entre associés

Virginie Florance conseille dès l’origine du projet (au moment de la constitution par exemple), avant même que germe l’idée d’une levée de fonds, de clarifier les relations entre associés afin d’éviter tout blocage entre eux au moment de la recherche d’investisseurs : c’est la contractualisation des relations dans un pacte d’associés.

Ce pacte permet de prévenir le risque de conflit futur et de mettre au jour les conditions de levée entre coassociés, un sujet essentiel.

    1. #2 Ne pas anticiper et manquer de préparation

La levée de fonds est une étape qui doit être appréhendée avant que le besoin se fasse sentir. “C’est un processus très long, le risque étant de manquer de temps et, par conséquent, de choisir un investisseur par défaut”, met en garde l’experte. Cela demande de constituer un dossier solide composé notamment d’un business plan et de la documentation de présentation (projections financières réalistes, valorisation d’entreprise concrète, etc.).

“Il est primordial de trouver le bon équilibre entre les fonds nécessaires et le pourcentage du capital à concéder”, avertit-elle. Cibler les investisseurs est important : étudier leur profil permet d’en savoir plus sur leur stratégie, leur historique, et ainsi de faire un choix éclairé in fine.

Pendant, lors de la mise en place de la levée de fonds

    1. #3 Négliger la lettre d’intention (letter of intent)

  1. Ce document juridique formalise la volonté d’investir et « fixe le cadre des futures négociations”, explique Virginie Florance. C’est pourquoi il ne faut rien signer sans avoir lu et négocié au préalable. Voici une liste non exhaustive d’éléments sur lesquels il faut se pencher avec attention :
    • La lettre d’intention comporte-t-elle un caractère engageant ?
    • Y a-t-il des prises de position sur la documentation future ?
    • Y a-t-il des clauses liantes comme l’exclusivité ou la confidentialité ?
    1. #4 Ne pas investir soi-même

Le fait d’investir un apport personnel est un facteur rassurant pour les investisseurs qui y voient une motivation et un signe de confiance des fondateurs dans leur projet.

    1. #5 Se laisser dépasser par les audits (due diligence)

Une fois la lettre d’intention signée, l’investisseur, avant de s’engager, entame un processus de vérifications de la société afin de se faire une idée précise de la situation de l’entreprise : c’est la phase dite des due diligence. Pour que ces audits se passent au mieux, les associés doivent gérer de front ces tâches et la gestion de leur activité en parallèle. Le risque étant de négliger son business au détriment de ces investigations, et rebuter ainsi les investisseurs intéressés qui y verraient une forme de négligence.

Afin d’optimiser cette période qui dure souvent plusieurs semaines, il convient de déléguer les tâches, d’informatiser le processus et de se rendre disponible pour répondre à d’éventuelles interrogations. Les fausses déclarations étant évidemment proscrites, c’est aussi l’occasion de se mettre à jour en interne et de déceler des dysfonctionnements.

    1. #6 Octroyer une garantie d’actif et de passif (GAP) trop punitive

Maintenant que les audits sont passés et si les investisseurs souhaitent continuer le process de levée des fonds, les parties vont entrer dans la phase cruciale de négociation de la documentation contractuelle. Les investisseurs peuvent notamment demander une GAP qui se compose de deux éléments :

  • un ensemble de déclarations fiscales, comptables, légales, sociales et d’autres domaines à destination de l’investisseur, appelant à une grande vigilance dans la fiabilité des informations communiquées ;
  • une clause d’indemnisation dans le cas où si l’une desdites déclarations venait à être erronée, l’investisseur serait en droit de demander un dédommagement résultant du préjudice subi du fait de cette mauvaise déclaration, qu’elle soit volontaire ou non. Cette clause énumère les conditions de l’indemnisation et les risques en jeu.
    1. #7 Mal négocier son pacte d’associés

“Le pacte d’associés est un document d’une trentaine de pages généralement divisé en deux parties : l’une sur la gouvernance, l’autre sur les transferts et l’émission de titres.” Concernant la gouvernance, il y a plusieurs points qui requièrent une certaine prudence : les modalités de nomination et de révocation des mandataires sociaux, l’adéquation du pacte avec les statuts, la mise en place d’un comité. Afin de ne pas se retrouver pieds et poings liés, il est nécessaire de négocier les conditions d’exercice du droit de véto des investisseurs en comité par exemple.

En ce qui concerne les transferts et l’émission de titres, il faut prévoir la liberté de certains transferts, négocier des droits de préemption réciproque et de sortie conjointe, l’obligation de sortie ainsi que la clause de liquidité. Enfin, “ne pas négocier seul et s’entourer de professionnels”, conseille l’avocate.

    1. #8 Ne pas intéresser ses salariés

La levée de fonds est un moment particulièrement propice à l’instauration d’outils d’intéressement pour les salariés (actions gratuites, bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE), stock options…). Il serait regrettable de ne pas en profiter.

En aval, une fois la levée de fonds terminée

 

    1. #9 Ne pas impliquer ses nouveaux partenaires

Ça y est, la levée de fonds est désormais achevée et les investisseurs détiennent un certain pourcentage du capital. Il faut désormais veiller à ne pas mettre de côté ces nouveaux partenaires et tenir les engagements pris dans le pacte d’associés, qu’il s’agisse d’établir un reporting régulier ou d’organiser fréquemment des réunions.

À défaut, “il y a des risques à la fois opérationnels et capitalistiques en cas de violation des engagements” qui peuvent mener les investisseurs à forcer la vente de titres ou qui peuvent tout simplement entraîner une perte de confiance de leur part.

    1. #10 Ne pas respecter ses engagements

En cas de non-respect de certaines clauses telles que l’exclusivité, la non-concurrence ou la non-sollicitation, il est possible, au-delà du “call” sur les titres, de devoir s’acquitter de dommages et intérêts. Afin de s’en prémunir, il est impératif de “s’assurer, lors de la négociation du pacte d’associés, que les clauses sont réalisables”. Cela passe notamment par la revue des conditions d’application de ces clauses dans le temps, l’espace, de façon directe ou indirecte.

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Pour conclure, la levée de fonds est donc un processus complexe et long qui requiert une organisation méthodique. Peu importe le type de levée, il s’agit toujours de cette même succession d’étapes à suivre, avec un degré de complexité qui diffère selon les enjeux financiers. Bien que le côté opérationnel soit essentiel, l’aspect juridique, entre autres, l’est tout autant, voire davantage, étant donné qu’il conditionne l’ensemble des relations avec l’investisseur.

La levée de fonds n’a désormais plus de secrets pour vous !

À propos

 

Virginie Florance, avocate associée en charge du bureau lyonnais de Mermoz Avocats, intervient régulièrement sur des opérations de fusions-acquisitions et de cessions d’entreprises pour le compte d’une clientèle française et internationale. Elle a également développé une expertise en private equity auprès de fonds et d’investisseurs au sein de cabinets internationaux et de Mermoz Avocats.

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